Dès le milieu des années 2010, KANTIFY, pionnière de l’IA, s’est fait un nom dans le secteur du pricing, du marketing personnalisé et de l’analyse d’images. Quelques années plus tard, la startup fondée par Ségolène Martin et Nik Subramanian a opéré un tournant spectaculaire et réussi à développer une technologie de découverte de médicaments pour lutter contre certaines maladies rares et le cancer.
Prise de conscience
Comment un tel changement de paradigme peut-il intervenir en quelques mois seulement ? L’annonce d’un diagnostic de cancer rare au sein de l’équipe a servi de détonateur.
« Nous avons réalisé qu’à condition d’être utilisée de manière adéquate, notre expertise pouvait avoir un impact sociétal fort dans le domaine de la santé. Car faire tourner une entreprise, c’est bien. Mais faire en sorte que cette entreprise vienne en aide aux malades en attente de traitement, c’est mieux », explique Ségolène Martin co-fondatrice et CEO de KANTIFY.
« Nous aspirions à continuer de jouer notre rôle de pionniers de l’IA cette fois dans le domaine de l’IA appliquée à la découverte pharmaceutique. Nous ambitionnions de développer une technologie qui fasse mieux que ce qui existait jusque-là en particulier dans le domaine des maladies rares et du cancer, qui parvienne à trouver des médicaments de manière beaucoup plus rapide, beaucoup moins chère et plus efficace. »
Success story
Cela a marché « incroyablement bien », se réjouit la fondatrice de KANTIFY. La startup bruxelloise n’a pas tardé à conclure des collaborations avec des institutions académiques de renom telles que l’université Johns-Hopkins à Baltimore aux Etats-Unis et le CECS/I-Stem (Centre d’Etude des Cellules Souches appartenant à la galaxie Téléthon) en France, ainsi qu’avec des laboratoires en Belgique, à Singapour, aux Pays-Bas ou en Espagne.
« A la base, notre équipe était reconnue pour la qualité de son expertise en IA. Pas en développement de médicaments. Nous avons bien sûr accueilli quelques collègues spécialistes de la bioingénérie ou de la chimie, mais nous avons surtout transformé en force de ce qui aurait pu passer pour une faiblesse. Au lieu de faire ‘comme les autres’, nous abordons des problèmes extrêmement complexes avec un regard complètement neuf. C’est notre secret pour accéder à l’innovation. Nous avons développé des stratégies entièrement neuves pour découvrir des cibles thérapeutiques ou de nouvelles molécules. En quelques années, nous avons réussi à développer une procédure totalement novatrice et qui fonctionne mieux que toutes les méthodologies disponibles jusqu’ici. C’est tellement excitant et motivant de déplacer ainsi les lignes ! »
Une double légitimité
« Avec l’IA, nous ne disposons pas d’une baguette magique, mais bien d’une baguette technologique », avertit Ségolène Martin qui détaille :« L’ensemble d’algorithmes d’IA qui constitue notre technologie baptisée SAPIAN contribue à la découverte de cibles thérapeutiques, de petites molécules ainsi qu’à la détermination précoce d’éventuels effets secondaires des traitements. Elle prédit des médicaments contre tel ou tel cancer ou telle ou telle maladie rare. Nos partenaires les testent et les valident en laboratoire. »
Non contente de proposer sa technologie aux entreprises biotech, KANTIFY développe aussi ses propres molécules en lien direct avec les besoins et les attentes des patients. Mais l’environnement réglementaire qui préside à la mise sur le marché de nouveaux médicaments prenant énormément de temps, les premières molécules développées avec l’aide de SAPIAN n’en sont encore qu’au stade ‘pré-clinique’ où elles sont soumises à une batterie de tests in vitro et in vivo en laboratoire avant, si tout se passe bien, de passer à la phase clinique de tests sur les êtres humains.
Il n’empêche, la présence de KANTIFY est parfaitement légitime dans l’environnement Lifetech bruxellois, et plus particulièrement dans le secteur Biotech et Digital Health. Ségolène Martin : « Il serait même plus exact de préciser que nous appartenons à un secteur émergeant baptisé TechBio qui recouvre l’utilisation de la technologie pour la biotechnologie. En effet, la capacité à utiliser la technologie et particulièrement l’IA à bon escient est de plus en plus différenciatrice dans le secteur de la biopharma soumise à des pressions croissantes en matière de productivité. » Rien d’étonnant donc à ce que KANTIFY appartienne tant au cluster lifetech qu’au cluster software car , dit sa CEO, « nous sommes autant une entreprise de software qu’une entreprise de découverte de médicaments. »
Bruxelles, une localisation qui fait sens
Cette double légitimité a en tout cas convaincu Innoviris qui soutient l’entreprise dans le cadre d’un projet de recherche sur la découverte de nouveaux types de médicaments dans le domaine du cancer en collaboration avec le CNRS. « Il s’agit d’un projet collaboratif très, très ambitieux. Les premiers résultats sont très intéressants », se félicite d’ailleurs Ségolène Martin.
Autant dire que la jeune Bretonne diplômée de Sciences Po Strasbourg et titulaire d’un MBA, venue à Bruxelles représenter sa région auprès de l’UE et restée dans la capitale pour y fonder sa première entreprise parce que c’était ‘the place to be’, se sent plus que jamais à sa place dans notre Région.
D’autant plus que dans le secteur de la TechBio, tout se joue aussi sur le long terme et que, dit-elle, « la Belgique en général et Bruxelles en particulier possèdent des équipes d’excellence en terme de technologie, d’IA et de biotechnologie. Il y a vraiment une carte à jouer en matière d’IA au service de la santé. Elle rendra possible la création de valeur à la fois pour les patients et en termes économiques. C’est la formule idéale. En tant qu’entreprise technologique, nous sommes vraiment heureux d’être à Bruxelles parce que la Belgique fait sens en matière de découverte de médicaments. »