Que se passe-t-il lorsqu’un biochimiste, Matthieu Egloff, et un spécialiste du commerce et du marketing, Nicolas Vertommen, se rencontrent au sein d’une entreprise commercialisant des équipements pour l’industrie biopharmaceutique qui les emploie ? Ils lancent OUAT ! et proposent aux industriels de créer le jumeau numérique de leurs usines et laboratoires.
« Nous avions remarqué que présenter un produit biotech à notre clientèle potentielle nécessitait une certaine expertise », indique Nicolas Vertommen « Nous désirions proposer à l’industrie une offre digitale sous un format de service en essayant d’amener de la nouveauté. »
Un jumeau numérique en gestation
Nous sommes en 2015, et cette nouveauté, encore balbutiante, ce sera la réalité virtuelle. « Nous avons créé la visite guidée d’une usine de thérapie cellulaire afin de raconter comment cette thérapie était produite », détaille Nicolas Vertommen. « Pour cela, il a fallu que nous modélisions tous les équipements, une centaine, en 3D. »
Inspiré par cette première réalisation et par l’outil numérique mis à la disposition de sa clientèle par un célèbre géant suédois de l’ameublement, le duo trouve dommage de ne pas rendre sa librairie d’équipements disponible à d’autres. En 2019-2020, deux investisseurs, finance&invest brussels et Innovation Fund, donnent sa chance à la startup et lui permettent de pivoter vers une société de produit.
C’est ainsi qu’est née la plateforme HakoBio. Elle a continué à se développer grâce à la confiance qu’elle a inspirée à sa clientèle, dont elle a toujours veillé, bien aidée par les bioingénieurs qui composent une partie de l’équipe, à comprendre le langage et les contraintes métiers.
Les trois verticale d’HakoBio
Dans un premier temps, l’accent est mis sur la simulation de l’environnement industriel et sur l’élargissement de la librairie d’équipements modélisés qui compte aujourd’hui plus de 3000 références. « Il est possible de travailler sur les flux, sur le process, sur l’usage des équipements dans le temps avec un intérêt particulier pour l’ergonomie, l’espace, l’optimisation de l’usage des différents équipements », précise Nicolas Vertommen.
Ensuite, des technologies immersives (réalité virtuelle, mixte) sont associées à la plateforme. La formation constitue dès lors la suite logique de la démarche « Il ne s’agit pas pour nous de remplacer la formation par la réalité virtuelle », insiste le co-fondateur de OUAT !, « mais plutôt de renforcer les systèmes déjà existants. Nous permettons à l’apprenant.e d’entrer dans l’environnement sans même y avoir mis réellement les pieds, et de le comprendre plus facilement et plus rapidement. Nous nous inspirons du jeu vidéo pour capter sa mémoire. »
Enfin, la représentation en 3D ou jumeau numérique de la structure constitue l’aboutissement de la démarche. « Cette représentation en 3D quasi réaliste de l’environnement de travail combinée à une architecture de plateforme ouverte permet d’interfacer de manière relativement simple les différents systèmes générant de l’information ou de la donnée autour du produit, de l’équipement, du procédé ou de l’usine », explique Nicolas Vertomment. « Ainsi l’opérateur.ice peut instantanément avoir accès à toutes les données et informations qui lui sont nécessaires, sans devoir naviguer dans plusieurs bases de données différentes, n’utilisant pas le même langage, parfois -surtout dans cette industrie- très complexes à utiliser. Nous avons été les premiers et nous sommes aujourd’hui a priori les seuls à offrir une solution qui couvre l’ensemble du cycle de vie du produit ou de l’usine.»
L’industrie pharmaceutique, terrain de jeu de OUAT !
HakoBio a été créé pour répondre aux besoins de l’industrie pharmaceutique. « Pour nous, c’est un véritable terrain de jeu », observe Nicolas Vertommen. « Contrairement à l’aéronautique très à la pointe de la réalité virtuelle avec les simulateurs de vol qui existent depuis de nombreuses années, il y a un vrai besoin dans ce secteur. Il est important pour nous de nous adresser à une industrie où il y a un vrai momentum à créer. Mais d’autres industries ressemblant à la biotech pourraient utiliser le jumeau numérique tel qu’il existe : les cosmétiques, le monde hospitalier, l’agro-alimentaire. Il nous suffirait de modifier la base de données et de remplacer certaines de nos références. Cela fait partie des axes de développement de l’entreprise d’ici 2 ans. »
Un ADN bien bruxellois
Matthieu Egloff et Nicolas Vertommen sont bien à Bruxelles et le revendiquent : « Je suis un enfant de la capitale », indique Nicolas Vertommen. « J’y suis né et j’y ai grandi, j’y ai mes racines. Le cœur de OUAT ! est à Bruxelles et y restera ! Contrairement à beaucoup d’autres, nous n’avons rien outsourcé à l’étranger. Il y a suffisamment d’expertise et de compétences ici pour travailler localement. On y gagne en réactivité, en flexibilité et en résultats. »
Ils ont d’ailleurs très tôt utilisé les ressources offertes aux jeunes entrepreneur.es par les institutions bruxelloises : « C’est historique », s’exclame Nicolas Vertommen. « impulse.brussels (qui a précédé hub.brussels) fut l’un de nos premiers rendez-vous avec OUAT !. Nous y avons trouvé de l’aide pour travailler sur nos plans financiers, sur la pertinence de notre business model et nous y avons noué de fructueux contacts. Aujourd’hui, nous sommes devenus acteurs de ces institutions puisque Matthieu est membre du board du cluster software et je suis membre du cluster lifetech. Même si nous travaillons désormais un peu moins avec hub.brussels, je participerai prochainement à un export day avec tous les attachés économiques bruxellois dans le monde. Les équipes de hub.brussels sont présentes, réactives, dynamiques et soucieuses de bien faire. Pour les questions importantes et impossibles à résoudre seul, c’est le point d’accès qui permet de débroussailler la question et de se connecter avec des experts. C’est vraiment très précieux. »
Pour autant, Nicolas Vertommen confie avoir déjà beaucoup voyagé avec HakoBio. L’Europe constitue le premier marché de OUAT ! devant l’Amérique de Nord « L’Asie, où nous ne sommes pas encore implantés, nous intéresse évidemment », ajoute-t-il. « Il n’est pas exclu qu’on s’internationalise. Le marché français nous tend les bras, notamment avec Sanofi, et sans petite structure sur place aux USA, c’est compliqué. » Et il conclut, philosophe : « Nul n’est prophète en son pays. » Avant de rassurer : « On continuera à développer la structure belge. »